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angles de vue...
31 juillet 2009

Extrait du registre des horreurs (2) - Portrait d’un égorgeur du GIA

Extrait du registre des horreurs (2)
 
Portrait d’un égorgeur du GIA


bourreau La confession d’un émir du GIA revient sur l’un des personnages employés par le GIA comme « égorgeur ». Ces professionnels de la lame, dont la fonction consistait à trancher les têtes, avaient pour mission de frapper l’imagination et de terroriser les populations. Ils passaient en fin d’opération, pour achever les blessés ; ils étaient chargés par les « tribunaux islamiques » des maquis d’exécuter les sentences de mort ; ils accompagnaient également les autres islamistes armés quand il s’agit d’exécuter à domicile un civil, pour une raison ou une autre. Ils étaient enfin des personnages clés dans les massacres de civils.  


« Je connaissais [Ammi Slimane] avant que le FIS ne soit interdit. Lorsqu’on l’avait vu, même une fois, on ne pouvait pas l’oublier. Physiquement, c’était un monstre âgé d’une quarantaine d’années. Il mesurait un mètre quatre-vingt-quinze et chaussait du 48. Il était peintre en bâtiment, originaire de Mostaganem mais habitait Zahana, autrefois Saint Lucien,où sa femme et ses enfants vivaient toujours. Je suis sûr qu’il était un bon père.

Ammi Slimane portait sur le côté un poignard de chasse tâché de sang coagulé qu’il aiguisait régulièrement sur une pierre ponce. Il avait beau le nettoyer après chaque exécution, il restait toujours des traces brunes sur la lame. » (p. 154)
 
« Il avait décidé lui-même de devenir égorgeur. […] Il aimait plaisanter avec les condamnés. Il les rassurait en leur disant : « Tu vas voir, ton problème va être réglé. Tu vas rentrer chez toi. » Ses victimes le prenaient pour un type doux et sympathique. » (p. 173)

« Ammi Slimane était à l’origine de l’AIS. Il était en faveur d’un Etat islamique mais n’avait aucune ambition. Il aspirait seulement à mourir pour aller au paradis. « Dieu s’occupera de mes enfants », disait-il. Mais avec les taghouts [tyrans], il était sans pitié » (p. 173)

« Un après-midi, de retour d’une expédition, on était tombés par hasard sur un policier et une prostituée qui faisait l’amour dans un bois, croyant être à l’abri des regards indiscrets. Ammi Slimane liquida le flic au couteau. Puis, il attacha la putain à un arbre et fouetta son dos quarante fois avec une branche. Elle criait sous les coups avec retenue. Elle n’osait pas hurler mais pleurait en gémissant. Ammi Slimane lui donna ensuite 5000 dinars, 500 francs, pour ses deux enfants, et accompagna la femme près d’un commissariat de police. « Va leur dire que leur copain est déjà loin, va ! » lui ordonna Ammi Slimane. La prostituée ne demanda pas son reste. Elle n’oubliera jamais ce qu’elle a vécu ce soir-là. Il faut avoir vu un homme se faire égorger pour pouvoir décrire ce que l’on ressent à ce moment précis. A chaque fois, j’avais la nausée. Le sang jaillissait d’un coup, deux mètres plus loin. La victime se vidait dans un gargouillis brunâtre. Ammi Slimane évitait de se coller à ses victimes pour ne pas être éclaboussé. Il les tenait à bout de bras.
Notre égorgeur était cependant susceptible de mourir dans une embuscade. Parce qu’il avait la main sûre, il était très demandé. Il ne pouvait pas être partout à la fois. Alors, il se décida à former les jeunes, pour assurer la relève. Une demi-douzaine se portèrent candidats. Ammi Slimane commença par la théorie. Même si le reste du groupe n’y participait pas, on suivait de loin les cours du professeur Slimane qui parlait haut, avec des gestes démonstratifs. Un des élèves servait de cobaye. Les autres écoutaient en cercle autour du géant. « Quand vous voulez égorger un prisonnier, il faut le mettre à genoux pour neutraliser la puissance de ses jambes, explique le maître bourreau. Votre main gauche appuie sur son front pour bien lui dégager le cou. Avec la main droite, armée du couteau, vous faites un mouvement circulaire au niveau de la carotide. Si le geste est juste et la lame bien aiguisée, le type « part » rapidement.

Ammi Slimane donnait ses cours comme si les apprentis égorgeurs étaient de vrais étudiants. […] Il saisit d’autres « outils de travail » : la scie à métaux et la hache. Pour couper les têtes, il utilisait de préférence la scie. La difficulté était de trouver le bon interstice entre deux vertèbres. L’idéal, selon lui, était de trancher d’abord le cou avec un couteau et d’attendre une heure. La victime ne mourrait pas tout de suite. Elle était agitée de soubresauts. On entendait ses râles mêlés à des spasmes pendant un long moment. « Ensuite, vous l’achevez à la scie à métaux, c’est plus propre et plus facile ». Ammi Slimane était si fort qu’il parvenait, à lui seul, à égorger un homme debout avec une scie de fabrication japonaise à large lame. Nul besoin d’en changer, ni de l’aiguiser. […] Le plus important, toujours selon Ammi Slimane, était de mettre le prisonnier à genoux, et de lier fortement ses mains derrière le dos, si possible avec du fil de fer. » (pp. 173-175)

« Le bourreau n’avait pas posé de questions. Il égorgeait pour terroriser la population et économiser les munitions. Un balle coutait 500 dinars. On ne devait pas les gaspiller » (p. 172)

« Ammi Slimane égorgeait, mais cela ne l’empêchait pas de dormir. Je ne l’ai jamais entendu dire qu’il avait fait des cauchemars. Il assassinait au nom de Dieu, sous couvert d’une fatwa, un dcéret religieux. Il avait donc la conscience tranquille. Pour les agents de l’état, il n’était pas nécessaire de demander une fatwa spécifique à un imam. […] Aussi, Ammi Slimane n’avait-il pas d’états d’âme. Il exécutait les ordres, et les hommes. Il était toujours disponible. » (p. 172)


Forestier Patrick, Confession d’un émir du GIA, en collaboration
avec Ahmed Salam,
Paris, Grasset, 1999.

Naravas


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